Les nouvelles figures du social : concepts et professions
La question sociale au XXIe siècle

Université d'été du 4 au 8 juillet 2016
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Les nouvelles figures du social


Ce projet propose une université d’été sur les nouvelles figures du social ainsi sur les changements provoqués par les transformations sociétales sur les professions du social. Il réunirait autour d’un concept central des sciences sociales de nombreuses équipes de sociologues, historiens, géographes, économistes de Sorbonne Paris Cité dont les objets de diverses manières relèvent du social et interrogent ces nouvelles figures du social. Mais autour d’une telle université d’été se réuniraient aussi des professionnels, et des associations d’usager à travers des conférences, des séminaires et des forums. Une telle manifestation donnerait un rayonnement original à SPC autour d’un thème pour lequel la France a apporté une contribution fondamentale depuis le XIXe siècle et pour la pensée duquel un travail collectif pluraliste de grande ampleur est désormais nécessaire.

UN ENJEU CONCEPTUEL

Le concept de social doit en effet être repensé au sein du champ conceptuel des sciences sociales à partir de la révolution numérique et de ses usages dans la quantification des comportements contemporains mais aussi à partir des dynamiques sociétales héritées des mouvements sociaux du XXe siècle et des transformations induites par la reconfiguration du travail et de son expérience à l’ère informationnelle. Il doit être interrogé à nouveaux frais à la fois sous l’angle des transformations globales d’où émergent des projets de traiter numériquement de questions de société (santé, comportement, communication, etc.), mais aussi sous l’ angle local des nouvelles formes de participation et « d’empowerment » des usagers et des citoyens, ou bien encore sous l’angle des transformations des rapports structurant qui liaient la protection et le travail et la sécurité au salariat. Il doit enfin être envisagé dans ses divisions (luttes, conflits, disruptions) autant que dans manifestations unitaires (solidarité, consensus, etc.)

On n’épuisera certes pas ici tous les enjeux du social dans un contexte où précisément on propose un espace public de réflexion sur les conditions pour le penser. Dans les années 90 un mouvement de réflexion sur le social s’est cristallisé en Europe et aux Etats Unis dans un débat intellectuel engageant sociologues, philosophes et historiens du social et de l’Etat providence. Cette actualité de la « nouvelle question sociale », pour reprendre ici le titre de l’ouvrage de Pierre Rosanvallon publié en 1995, a pour, diverses raisons, tourné court. Entre les premières réflexions sur « l’individualisation du social » (P. Rosanvallon) et le diagnostic de la « désaffiliation » (R. Castel), pour ne donner que deux grandes références d’alors, le débat s’est crispé en France sans qu’il soit donné suite à la réflexion. Les incursions dans le domaine de la prévision et du « monitoring » n’ont pas prises en compte les effets bouleversants du numérique a partir notamment d’internet et des nouvelles technologies de la communication développées aux Etats-Unis. Les questions importantes posées par la « nouvelle question sociale » n’ont pas donné lieu à un véritable projet scientifique et les mutations des expériences et des pratiques du social n’ont pas fait l’objet de l’investigation nécessaire pour en sonder la diversité et la complexité dans un dialogue effectif avec les professionnels et les usagers.

C’est dans un respect du pluralisme constitutif de la communauté scientifique de Sorbonne Paris Cité, la reprise de ces questions restées en suspens, que l’on propose d’examiner collectivement à l’occasion de cette université d’été.

On propose notamment d’interroger « l’individualisation du social » dans un contexte participatif étayé sur des pratiques professionnelles et les prises de parole des acteurs et des usagers. Sous le mot « empowerment » il s’agit peut-être moins d’encourager un processus d’activation, de responsabilisation, comme y ont invité les auteurs de la troisième voie, que d’encourager l’autonomie de la société civile grâce à des garanties procédurales, et en favorisant l’existence d’un réseau associatif et de collectifs mobilisés dans une perspective de changement social.

On se propose aussi d’interroger un social qui apparait de plus en plus sous les traits d’une fragmentation communautaire, si l’on entend le mot à la fois dans son sens restreint de gemeinschaft, mais aussi au sens large de mise en commun. D’un côté, ce qui du social faisait question se diffracte en culturel et en identitaire. A l’heure des sociétés globalisées, les mobilités et les interactions entre les groupes engagent de nouvelles médiations du social et des différenciations culturelles. La circulation des individus, au-delà de la sphère de souveraineté des nations, engage des formes de recompositions communautaires avec leurs cristallisations culturelles et éventuellement religieuses. D’un autre côté, ce qui faisait le social comme organisation et division du travail s’éclate et se répand à travers une multiplicité de formes de socialisation et d’agrégation des individus : communauté collaboratives, coopératives, associations, etc., tandis que les anciens appareils – y compris syndicaux – perdent de leur pertinence. De diverses manières la protection et l’assurance qui s’étayaient sur le travail entre en crise tandis qu’économistes et juristes notamment cherchent à produire des projets sociaux alternatifs.

Aujourd’hui se dessine aussi une exigence épistémologique nouvelle et décisive sur la place des mathématiques dans le social. Un certain traitement du social, qu’il soit prédictif ou assurantiel, est passé par la promotion politique au XIXe siècle de la statistique et du calcul probabiliste, donnant naissance à l’Etat moderne et à la prise en charge biopolitique de populations. Au moment où le calcul prédictif en termes de santé et de prévention des risques prend un important virage avec les avancées des nouvelles technologies de l’information et de la communication, il est temps de procéder à un retour épistémologique sur les effets de la numérisation sur les comportements individuels autant que sur les politiques publiques. Les divers projets nord-américains et à caractère privé de numérisation de l’activité et de la santé humaines font des transformations du social un enjeu radical de ce début du XXIe siècle.

La plupart des disciplines des sciences sociales, sociologues, historiens, géographes, anthropologues sont engagés dans cette dynamique de réflexion et doivent être mobilisées : il y à la fois le besoin d’un retour sur les diverses histoires du social mais aussi l’enjeu d’investigations des multiples manifestations du social : comment entre autre il s’inscrit et prend forme dans les déterritorialisation migrantes, mais aussi dans le territorial et l’environnemental.

LE SOCIAL A SORBONNE PARIS CITE

Ces quelques lignes n’épuiseront pas les nouvelles questions sociales, il s’agit seulement de montrer la pertinence d’interrogations qui doivent être sondées et éprouvées collectivement entre enseignants chercheurs professionnels et citoyens. Il me semble que ce serait là une belle opportunité pour une communauté scientifique de donner toute sa mesure dans un ensemble d’échanges qui engagera aussi des invités et des spécialistes de ces questions à l’international. Outre les collègues historiens, géographes, sociologues de Paris Diderot à qui ce projet a été présenté dans le cadre d’une rencontre avec la préfiguratrice du pôle Mme K. Rousselet, des contacts ont été pris à avec Bruno Pequignot, (Directeur de l’U.F.R. Arts & Médias, de Paris III), avec Olivier Martin et F. de Singly (CERLIS de Paris V) avec Claude Martin (Directeur du Centre de recherche sur l’action politique en Europe – EHESP) et bien évidemment d’autres pourparlers sont en cours dans SPC. M. Wieviorka a donné son accord pour un partenariat de la Fondation de la Maison des Science de l’Homme autour du projet.

Pour concrétiser celui-ci on trouvera ci-dessous quelques questions pouvant faire l’objet d’interventions dans le cadre de ces journées d’été : « l’individualisation du social » - significations et conséquences pour l’action sociale ; l’enjeu associatif – conceptualisation, compréhension et nouveaux métiers ; les expressions culturelles du social – identités, communautés, discriminations et les nouvelles pratiques de la médiation ; la culture et le lien : significations sociales de la culture, des arts et de leurs intermédiations ; le social traversé par le genre - pratiques du genre en entreprise et dans la société ; institutions, action citoyenne, mouvements sociaux ; un travail social au-delà de la tradition du service public ? ; savoir social et mouvements sociaux – les sciences sociales à l’épreuve de l’action collective ; transformations du travail social, « empowerment » et autonomies citoyennes ; le social dans le territoire : inégalité, discriminations, pratiques locales et enjeux démocratiques ; le devenir environnemental du social et ses conséquences : luttes locales et luttes globales ; travail, autonomie, et coopération (vers de nouvelles formes d’indépendance à « l’âge du faire ») ; travail, nouvelles organisations collectives, nouvelles mobilisations – des luttes au-delà du syndicalisme ? ; méthodologies du social : reconfigurations méthodologiques de l’action sociale et des méthodes des sciences sociales dans un contexte « d’individualisation du social » ; famille, conjugalisation et protection sociale ; numérisation et société, algorithme et monitoring (travail, santé communication), etc.